TEMOIGNAGE
MADAME
DELPHINE TSANGA,
Premier
Ministre des Affaires Sociales (1975-1984)
« A
l’époque le budget du Ministère des Affaires Sociales était de 437 millions de
francs Cfa »
Le service s’appelait, le service des
Affaires Sociales et de la Population et était intégré au Ministère de la Santé
Publique. Sur le plan de la collaboration extérieure, j’ai surtout collaboré
avec une association qui avait son siège en Suisse et dont le Secrétaire
Général était Monsieur Pierre ZUMBACH. Nous avons initié un certain nombre de
projets tels le premier pont sur la Sanaga, le pont de l’Enfance sur lequel nous
devrions créer un poste de péage dont les fonds devaient servir à prendre en
charge les enfants. A l’époque, nous étions membres de l’Union Internationale
de la Protection de l’Enfant (UITE) et c’est dans ce cadre que nous avons
organisé en 1980 une réunion internationale arabo-africaine sur la protection
de l’enfant. Avec M. Zumbach nous avions aussi lancé le projet de développement
du Mbam, mais compte tenu des difficultés gouvernementales, nous n’avons pas pu
commence ce projet qui avait alors été réalisé par notre partenaire de
l’époque, Mgr Jean ZOA et Mgr Lambert VAN HEYGEN.
La première fois qu’on a mentionné les
personnes handicapées pour moi était un motif de fierté, parce que chaque fois
que j’évoquais les problèmes de cette catégorie sociale, l’Etat me répondait
que l’on n’avait déjà beaucoup de problèmes avec les personnes valides pour y
ajouter ceux des personnes handicapées. A cette époque, les handicapés
n’avaient pas le droit de travailler à la Fonction Publique, de faire de
grandes études ni d’enseigner, à tel point que chaque fois qu’un handicapé
avait un problème il fallait le résoudre personnellement. Il était clairement
mentionné dans les textes qu’avant de se présenter à un concours administratif,
vous devriez passer des tests médicaux pour déterminer si vous ne souffriez pas
d’un handicap de quelque nature que ce soit. C’est à partir de ce moment que
j’ai instruit mes collaborateurs de commencer à mener une réflexion sur la
protection des droits des personnes handicapées qui a débouché par la
promulgation en 1983 de la loi sur la protection et la promotion des droits des
personnes handicapées. Tout ceci avait eu comme catalyseur la construction par
le Cardinal LEGER du Centre National de Réhabilitation des Personnes
Handicapées d’Etoug Ebé. Ensuite, j’ai créé, avec l’aide de la Suisse, un
centre de formation pour les personnels sociaux, l’ENEAS (Ecole Nationale des
Educateurs et Assistants Sociaux). Vous savez les cadres qui existaient à cette
époque avaient été formés sur le tas et il n’y avait pas 10 cadres formés en
France. J’avais beaucoup de difficultés pour recruter des universitaires parce
que c’était un ministère qui n’attirait pas beaucoup les intellectuels. Je me
souviens que lorsqu’un fonctionnaire était affecté au Ministère des Affaires
Sociales, il le prenait comme une punition. Le MINAS était le plus petit
ministère, avec le plus petit budget. Les premiers que j’ai pu avoir c’est
Monsieur ENYEGUE et Madame MVONDO. Avec la création de l’école, il y a eu un
cadre des fonctionnaires des Affaires Sociales et ce n’est qu’à partir de ce
moment que beaucoup se sont dits qu’il y avait un avenir dans ce ministère, il
faut dire qu’avant aucun avenir n’était possible au MINAS.
Je dois vous dire qu’en ce qui concerne les
aides et appuis, je mettais très souvent la main dans ma poche car il m’était
presqu’impossible de rester impassible devant toutes ces personnes vulnérables
que je trouvais parfois devant ma résidence.
A l’époque le budget du Ministère des
Affaires Sociales était de 437 millions de francs Cfa. Jusqu’à mon départ en
1984, je n’ai pas atteint un milliard. Les fonds générés par les activités
Génératrices de Revenus (AGR) que le Ministère avait mis en place étaient
systématiquement reversés au trésor public. Je devais également gérer les
problèmes des femmes. Ce sont elles qui ont créé ce qu’on appelait l’animation
rurale.
Le monde évolue. A l’époque, c’est moi
qui allais vers les clients du service social. Aujourd’hui, ce sont les
populations qui réclament des prestations sociales.
Entretien avec Mathieu
Meyeme
1 commentaire:
Les propos ont été recueillis à son domicile
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