Doigté et professionnalisme
pour savoir les gérer
La résolution
des conflits familiaux peut faire appel à des techniques innées propres à toute
personne, mais aussi à l’expertise d’un médiateur, professionnel neutre.
La notion de
famille varie énormément selon les sociétés Mais anthropologues, ethnologues,
sociologues et historiens considèrent que les systèmes familiaux sont aussi
divers et complexes que le sont les cultures du monde. Les ethnologues
distinguent la famille nucléaire, formée par les époux et leurs enfants, et la
famille élargie, ou étendue, qui groupe, parfois dans une même unité
résidentielle, trois ou quatre générations. C’est cette acception qui est
généralement considérée comme la règle en Afrique et au Cameroun en particulier.
Toutefois, à moins de vivre sur une île déserte, il est pratiquement impossible
de ne pas être confronté à un moment ou l'autre à un conflit. Ainsi, malgré l’amour
que les membres d’une même famille éprouvent les uns pour les autres, les
conflits font inévitablement partie de la vie, car nous avons tous des
croyances, des besoins et des désirs différents. Que ce soit avec le conjoint, les parents ou les enfants, divorce, garde d’enfants, pension alimentaire,
succession… les
situations
de conflit ne manquent pas.
Bien qu’un conflit familial soit parfois
épineux, l’aptitude à le résoudre de façon positive est essentielle non
seulement à la santé émotionnelle de chacun, mais aussi au bien-être de la
famille en tant que groupe. Selon la plupart des thérapeutes familiaux, la
résolution d’un conflit se fonde en grande partie sur le respect mutuel et la
volonté de chacun de trouver des solutions qui conviendront à tous. En faisant
l’effort d’aller avec calme et maturité au fond du problème que représente un
conflit familial, la communication et la coopération sont améliorées, la
confiance et le soutien mutuel sont renforcés et, surtout, tout cela contribue
à créer une dynamique familiale plus paisible.
Selon
Jean-Pierre Makang, Inspecteur des Affaires Sociales et sous-directeur de la
promotion des droits de la famille au Ministère de la Promotion de la Femme et
de la Famille,
le schéma de la résolution d’un conflit familial fait appel aux étapes
ci-après : « Analysez la situation. Les querelles suivent souvent un
scénario similaire. Avez-vous le même genre de dispute tous les jours?
Existe-t-il un moment de la journée où les discussions ont tendance à
s’envenimer? À quel point vos désaccords sont-ils sérieux? Il se pourrait qu’un
simple changement de routine ou le fait de prendre le temps de vérifier si les
membres de la famille sont affamés, fatigués ou stressés après une journée au
travail ou à l’école suffise à résoudre les disputes de moindre importance. Parlez-en. Avant d’aborder de front les membres de
la famille, prenez le temps de réfléchir aux raisons pour lesquelles un certain
problème vous préoccupe. Assurez-vous d’être en mesure de préciser la cause du
conflit, selon vous. Pourquoi est-ce un problème? Qu’est-ce qui présente un
problème – la situation elle-même ou vos sentiments à cet égard? N’espérez pas
trouver une solution lorsque les esprits sont échauffés – prévoyez un moment où
toutes les personnes en cause pourront se réunir afin de parler du problème
dans le calme et de façon productive. Clarifiez le problème. Un moyen de gérer une impasse consiste
à réunir les membres de la famille et à fournir à chacun l’occasion d’exprimer
son opinion à l’égard de la nature du problème, y compris les répercussions et
l’implication personnelles. Surveillez votre ton de voix et votre choix de
mots. Si la discussion se dégrade, prenez une pause et reprenez la conversation
lorsque chacun sera plus calme et plus ouvert. Si vous réussissez à demeurer
dans le temps présent et si vous évitez de lancer des accusations ou de
ressasser d’anciens problèmes, il vous sera plus facile de résoudre le conflit.
Écoutez. Quelle que soit la cause
du conflit, différents styles de gestion et de communication peuvent aussi
contribuer à atténuer les difficultés. Pour résoudre un conflit, il est
nécessaire que chacun ait l’impression d’avoir vraiment été écouté. Manifestez
du respect et tentez de comprendre ce qui est dit. Évitez d’adopter une
attitude défensive et d’interrompre la personne qui parle. Un parent ou un arbitre pourrait vouloir noter au fur et à
mesure les points d’entente et de mésentente. Cherchez des solutions. Lorsque chacun aura exprimé son
opinion à l’égard du problème faisant l’objet d’un conflit, conjuguez vos
efforts et dressez une liste de toutes les solutions possibles et imaginables.
Ne les analysez pas – contentez-vous de les noter. Ensuite, faites le tour et
demandez à chacun d’identifier la meilleure solution selon lui et d’en
expliquer les raisons. Ce processus permettra de réduire le nombre de possibilités
et d’adopter une solution qui conviendra à tous. Obtenez l’engagement de
chacun. Pour que
la solution choisie soit efficace, les membres de la famille devront accepter
de s’y conformer et faire en sorte qu’elle réussisse. Ils doivent s’entendre au
sujet de leur responsabilité, des conséquences et des limites de leur démarche.
Faites un dernier tour, demandez à chacun d’énoncer ce qu’il s’engage à faire,
et assurez-vous que tous soient convaincus d’avoir été écoutés et qu’ils aient
bien compris l’origine du conflit. Enfin, effectuez un suivi. Plus tard, il sera important de
demander à chacun ce qu’il éprouve à l’égard des difficultés rencontrées. Les
membres de la famille ont-ils l’impression que la solution est efficace? Il y a
toujours moyen de la peaufiner. Le conflit fait-il toujours rage alors qu’il
est impossible d’entrevoir une solution? Il est peut-être temps de demander du
soutien à un médiateur ou à un autre professionnel. Parfois, l’opinion d’un
tiers permet de voir la situation sous un angle différent. »
MEDIATION FAMILIALE
« Il
peut être utile de recourir aux services d’un médiateur familial ». Reconnait, Chimène Ngono, Assistante sociale en service au Ministère des
Affaires Sociales. Tiers impartial, indépendant
et qualifié, il tentera de restaurer la communication et de trouver une
solution amiable au conflit qui vous oppose. D’abord considérée comme un processus de gestion des conflits familiaux
liés au divorce et à la séparation, la médiation familiale est aujourd’hui plus
largement utilisée pour restaurer le dialogue au sein de la famille. La Médiation Familiale peut être définie
comme un : « processus de
construction ou de reconstruction du lien familial axé sur l’autonomie et la
responsabilité dans lequel un tiers impartial, indépendant, qualifié et sans
pouvoir de décision – le médiateur familial – favorise, à travers
l’organisation d’entretiens confidentiels, leur communication, la gestion de
leur conflit dans le domaine familial entendu dans sa diversité et dans son
évolution ».
Globalement, la médiation familiale peut concerner toute personne en
situation de rupture des liens familiaux. Par exemple : les couples (mariés, ou concubins) en situation de rupture, qu’il
s’agisse d’un divorce ou d’une séparation, les grands-parents souhaitant
conserver des liens avec leurs petits enfants, les frères et sœurs qui doivent
régler une succession conflictuelle,
les jeunes adultes en conflit avec leurs parents.
En tant que
modérateurs, les médiateurs familiaux proposent
aux familles un espace et un temps d'accompagnement pour : favoriser une
atmosphère positive de discussions, prendre de la distance par rapport à des
événements familiaux, réfléchir ensemble à la construction de l'avenir,
travailler à une meilleure communication familiale ou permettre la conclusion
d'accords adaptés aux besoins de chacun. Une médiation peut être initiée à tout moment par un membre de la famille
ou conseillée / ordonnée par un juge en cas de procédure judiciaire.
Elle se déroule dans un lieu neutre : maison
de la médiation, espace famille, espace aménagé par un médiateur libéral… Au
cours d'un 1er entretien d'information, sans engagement, le médiateur reçoit
les différentes personnes concernées et leur expose les objectifs de la
démarche. S'ils sont d'accord, ils se retrouvent pour une série d'entretiens
qui peuvent s’étendre sur une période variant de quelques semaines à plusieurs
mois.
L’enseignement de l’Eglise nous apprend
que les divisions sont multiples et parfois les familles se trouvent dans des
impasses. Le Bienheureux Jean Paul II rappelle dans sa lettre aux familles
(familiaris consortio) que « La
famille a pour mission de transmettre et révéler l’Amour ». Pour
pouvoir faire un chemin de réconciliation il faut commencer par
« dire » les blessures ! Il faut pouvoir mettre des mots sur ce
qui a pu blesser car la peur de nommer les choses est un obstacle à la réconciliation.
Pour commencer dans l’humilité un
processus de réconciliation et pour regarder l’autre en face sans haine et sans
souffrir, il faut souvent du temps.
La réconciliation n’est pas d’abord
notre affaire mais l’œuvre de Jésus-Christ. En voyant comment nous sommes
divisés, éclatés dans nos familles, nous pourrions nous décourager !
Et parce que cette réconciliation n’est
pas possible, Jésus est venu et l’a rendu possible ! Car ce n’est pas à
notre mesure. Quand l’histoire nous divise, l’Esprit Saint, lui, veut nous
unifier. Et Dieu fait alliance pour que nous retrouvions cette unité. Et
l’Eglise répond avec le Concile (cf. Lumen Gentium n°9 à 20) : « L’Eglise est le Sacrement de l’unité
de l’homme avec Dieu et des hommes entre eux. »
Mathieu Meyeme